Page:Schopenhauer - La Pensée, 1918, trad. Pierre Godet.djvu/91

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
49
i. de la connaissance

En revanche, la connaissance intuitive, qui ne saisit jamais que le fait isolé, est toujours en rapport immédiat avec le cas présent ; pour elle la règle, le cas et l’application ne font qu’un, et l’acte s’y conforme instantanément. On s’explique ainsi pourquoi, dans la vie pratique, le savant, dont la supériorité consiste dans l’abondance des connaissances abstraites, le cède à ce point à l’homme du monde, dont tout l’avantage est dans une parfaite science intuitive qu’il tient de sa nature première et qu’une riche expérience de la vie a développée.


Savoir et percevoir.

Savoir veut dire tenir à la disposition de son esprit certains concepts qu’on puisse reproduire à volonté, et qui aient dans n’importe quoi, en dehors d’eux-mêmes, leur « raison suffisante de connaissance », c’est-à-dire qui soient vrais. La connaissance abstraite est donc seule un savoir ; et, comme la raison est ainsi la condition du savoir, nous ne pouvons pas, rigoureusement parlant, dire des animaux qu’ils sachent quoi que ce soit, malgré qu’ils soient doués de connaissance sensible, d’une mémoire appropriée, et par là-même d’imagination ; témoins leurs rêves. Si nous disons d’eux néanmoins qu’ils sont doués de « conscience », malgré que ce mot ait étymologique-