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sur la connaissance a priori


REMARQUES SUR LE TABLEAU QUI SUIT (Pages 184,185).

Sur le § 4 de la Matière. — L’essence de la matière consiste dans l’agir : elle est l’agir in abstracto, partant l’agir en général, indépendamment de toute diversité du mode d’action. Elle est absolument cause. C’est pourquoi, dans son existence même, elle n’est pas soumise au principe de causalité, elle est sans commencement ni un autrement ce serait la loi de causalité s’appliquant à elle-même. Comme nous avons a priori la notion de causalité, le concept de la matière, à titre de fondement indestructible de toute existence, peut prendre place parmi nos connaissances a priori, en tant qu’il n’est que la réalisation d’une forme de connaissance, qui nous est également donnée a priori. Car pour nous toute activité se représente ex ipso comme matérielle, et inversement, toute matière comme nécessairement active : ce sont en effet des concepts réciproques. Aussi employons-nous en allemand le mot réel (Wirklich, agissant), comme synonyme de matériel ; de même, en grec, ϰατ’ένεργείαν par opposition à ϰατὰ δύναμιν trahit la même origine, puisque ένεργεία signifie l’agir en général. De même enfin l’anglais actual employé pour réel (wirklich). Ce que l’on appelle « remplir l’espace » ou être impénétrable, et ce que l’on regarde comme le caractère essentiel du corps (c’est-à-dire du matériel), n’est pas autre chose que ce mode d’activité, qui appartient à tous les corps en général, c’est-à-dire l’activité mécanique. La généralité, en vertu de laquelle ce mode d’action fait partie du concept d’un corps, et résulte a priori du concept de ce corps, par conséquent n’en peut être séparé sans supprimer le corps lui-même, cette généralité le distingue des autres modes d’activité, soit électrique, soit chimique, lumineuse ou calorifique. Dans ce fait de remplir l’espace, ou activité mécanique, Kant a très justement distingué la force attractive et la force répulsive, comme on décompose en deux une force mécanique donnée, au moyen du parallélogramme des forces. Mais ce n’est au fond qu’une analyse raisonnée du phénomène, dans ses éléments constitutifs. Ce sont les deux forces réunies, qui maintiennent le corps dans ses limites, c’est-à-dire dans un volume déterminé. Séparées, l’une dilaterait le corps à l’infini, tandis que l’autre le ramasserait tout en un point. Malgré ce balancement ou cette neutralisation, le corps exerce cependant une action répulsive sur les autres corps en vertu de la première force, et une action attractive en vertu de la seconde, dans la gravitation. De cette façon les deux forces ne se détruisent pas dans le corps, leur produit, comme deux forces impulsives agissant dans une direction opposée ou bien comme la formule + ee, ou enfin comme l’oxygène et