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MÉMOIRES SUR LES SCIENCES OCCULTES

nière et la plus faible dérivation de la même source, le simple pressentiment. Ces pressentiments sont plus souvent de nature triste que de nature gaie, parce que justement la vie est faite plutôt de tristesse que de joie. Une disposition sombre, une attente anxieuse de ce qui doit arriver s’est, à notre réveil, emparée de nous sans cause apparente. Il faut expliquer cela, d’après ce que nous avons dit, par ce fait que la transposition en question du rêve que nous avons eu, au plus fort de notre sommeil, du rêve théorématique vrai, annonçant un malheur, en rêve allégorique du sommeil léger, n’a pu se produire ; et que, par suite, de ce rêve il n’est rien resté dans notre conscience que son impression sur notre humeur, c’est-à-dire sur la volonté même, qui est proprement et en dernière analyse l’essence de l’homme. Cette impression, maintenant, se répercute comme un pressentiment prophétique, un pressentiment obscur. Parfois cependant ce pressentiment ne s’emparera de nous qu’au moment où se réaliseront les premières conjonctures du malheur annoncé dans le rêve théorématique, par exemple au moment où l’individu est sur le point de monter sur le navire qui doit sombrer, ou quand il s’approche de la poudrière qui doit