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Page:Schopenhauer - Sur la religion, 1906.djvu/118

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Tout cela jette de la lumière sur l’arbre généalogique de Jéhovah.

Le Nouveau Testament, au contraire, doit avoir une origine indoue quelconque ; son éthique, qui transfère la morale dans l’ascétisme, son pessimisme et son avatar en témoignent. Tout cela le met en opposition décidée avec l’Ancien Testament : de sorte que l’histoire de la chute de l’homme est le seul point de connexion possible entre les deux. Quand, en effet, la doctrine indoue fit son apparition sur la terre promise, il fallut combiner ces deux choses bien différentes : la conscience de la corruption et de la misère du monde, de son besoin de délivrance et de salut par un avatar, avec la morale de l’abnégation de soi-même et du repentir, avec le monothéisme juif et son πάντα καλὰ λίαν (toutes choses sont très bonnes). Et la tentative réussit aussi bien qu’elle pouvait, aussi bien du moins qu’il était possible de combiner deux doctrines aussi hétérogènes et même opposées.

Comme un lierre, en quête d’un appui, s’enlace autour d’un tuteur grossièrement taillé, s’accommode à sa difformité, la reproduit exactement, mais reste paré de sa vie et de son charme propres, en nous offrant un aspect des plus agréables, ainsi la doctrine chrétienne issue de la sagesse de l’Inde a recouvert le vieux tronc, complètement hétérogène pour elle, du grossier judaïsme ; ce qu’on a dû conserver de la forme fondamentale de celui-ci est quelque chose de tout différent, quelque chose de vivant et de vrai, transformé par elle. Le tronc semble le même, mais il est tout autre.

Le Créateur en dehors du monde, qu’il a produit de rien, est identifié avec le Sauveur, et, par lui, avec l’huma-