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Page:Schopenhauer - Sur la religion, 1906.djvu/40

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près ce que produit l’inoculation précoce de la foi ? regarde les Anglais. Vois cette nation favorisée entre toutes par la nature, et douée plus qu’aucune autre d’intelligence, d’esprit, de jugement et de fermeté de caractère ; vois-la profondément rabaissée au-dessous de toutes les autres, et rendue réellement méprisable par sa superstition stupide qui apparaît, au milieu du restant de ses qualités, comme une idée fixe, une monomanie. Cet état de choses est uniquement dû à ce que l’éducation des Anglais est entre les mains du clergé, qui prend soin de leur inculquer dès l’âge le plus tendre tous les articles de foi, de façon à produire chez eux une sorte de paralysie partielle du cerveau ; celle-ci se manifeste ensuite tout le restant de leur vie par cette idiote bigoterie qui dégrade des gens très intelligents sous d’autres rapports, et nous égare complètement sur leur compte. Si nous considérons combien l’inoculation de la foi dès le bas âge est essentielle à une pareille œuvre, le système des missions ne nous apparaîtra plus seulement comme le comble de l’importunité, de l’arrogance et de l’impertinence humaines, mais aussi comme une absurdité, s’il ne se borne pas à des peuples encore à l’état d’enfance, tels que les Hottentots, les Cafres, les insulaires de l’océan pacifique, et autres. Là il a obtenu un réel succès. Dans l’Inde, au contraire, les brahmanes accueillent les discours des missionnaires avec un sourire d’approbation condescendante, ou avec un haussement d’épaules ; on peut affirmer qu’en ce pays, malgré les circonstances les plus favorables, les tentatives de conversion des missionnaires ont complètement échoué. Un rapport authentique consigné dans l’Asiatic Journal, t. XXI,