Page:Schwob - Cœur double, Ollendorff, 1891.djvu/293

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lustrés, s’effilaient aux tempes ; les lèvres avaient une mine railleuse, les dents un aspect cruel. Mais ses mains semblaient deux croix rouges élargies à ses bras, avec les prolongements noueux de doigts farouches.

« Beau, ce soir, dit-il à Louisette d’une voix innocente.

— Ah ! répondit Louisette, il fait bon. » Elle sourit très faiblement.

Il en profita aussitôt et dit plus durement :

« Qu’est-ce que tu fais ici ? Comment t’appelles-tu ?

— Tiens, Louisette, répondit-elle. Et toi ?

— Moi je suis l’Assassin. »

Elle se recula un peu, et ouvrit les yeux. Il rit de travers et continua :

« L’Assassin, parce que je fais des chopins, tu comprends, pour les amis. Je pilonne, je les assiste. Un coup chez les épiciers, une autre fois chez les marchands de trottins ; un dégringolage par-ci, un tapage par-là ; je fais la manche dans les grands cafés ; je leur apporte du perlot, quand ils sont au jetard et qu’ils n’ont pas de quoi fumer ; je rapplique à la condice gratter leurs lards, quand elles leur font des paillons ; quelquefois, si elles ont des mecs à la mie-de-pain, je les aide à les gameller, je leur amène des mômes costo, qui sont forts pour la poigne. Les poules me donnent des thunes, celles qui sont meule, larantequé ; les camarluches me font lamper