Page:Schwob - La Lampe de Psyché, 1906.djvu/241

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une pour mon prince. Voilà comme nous vivrons. Nous partagerons tout pour nous trois, et nous n’aurons pas de sœurs méchantes.


Les nuages gris s’étaient amassés dans le ciel. Une bande blême s’élevait vers l’Orient. Les arbres se baignaient dans une pénombre livide. Tout à coup une bouffée de vent glacé secoua le jupon de Cice. Les choses frissonnèrent. Le chardon violet s’inclina deux ou trois fois. Le chat fit le gros dos et hérissa tous ses poils.

Cice entendit au loin sur la route une rumeur grinçante de roues.

Un feu terne courut aux cimes balancées des arbres et le long du toit de la petite maison.

Puis le roulement s’approcha. Il y eut des hennissements de chevaux, et un murmure confus de voix d’hommes.

— Écoute, chat, dit Cice. Écoute. Voilà une grande voiture qui arrive. C’est la voiture de mon prince. Vite, vite : il va m’appeler.

Une pantoufle de cuir mordoré vola par-dessus les groseilliers, et tomba au milieu des cloches.