Page:Scientia - Vol. IX.djvu/422

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aucune action : dans toute la France méridionale, le français est une langue étrangère qui s’impose aux villes, mais qui n’a pas encore déplacé les parlers locaux à la campagne.

La situation de l’anglais est un peu différente ; l’anglais commun est en somme le parler de Londres, comme le français est le parler de Paris ; mais, à la différence de Paris, Londres se trouve au point de rencontre de plusieurs dialectes, si bien que l’anglais présente des traits qui appartiennent originairement à des dialectes distincts. Le cas de l’allemand est tout autre : il n’existait en Allemagne aucun centre, comparable à Paris ou à Londres ; aucun ne s’imposait naturellement. Mais le besoin était le même. La langue commune est sortie du grand mouvement de colonisation qui a permis aux Allemands de conquérir progressivement toute l’Allemagne orientale et qui est le fait fondamental de l’histoire de l’Allemagne ; c’est en réalisant cette œuvre que les Allemands formaient une unité ; et c’est par suite dans les pays de colonisation que l’allemand littéraire s’est formé, surtout parmi la bourgeoisie des villes établies dans les régions colonisées au moyen âge ; c’est donc en Bohême et surtout dans les villes de Saxe que l’allemand actuel s’est constitué au cours du moyen âge. Les chancelleries des princes et des villes l’ont fixé peu à peu. La Réforme, en le prenant pour langue littéraire, lui a donné sa forme définitive. Mais l’allemand commun est demeuré, plus que le français et l’anglais, une simple langue écrite ; les choses qui se fixent par l’écriture, à savoir le vocabulaire et la grammaire, sont à peu près identiques partout ; mais la prononciation varie beaucoup de région à région, sans qu’on puisse nettement, comme en français ou en anglais, déclarer vicieuse telle ou telle manière de prononcer : tout le monde sait combien le système articulatoire est différent à Cologne, à Berlin, à Leipzig, à Francfort, à Munich et à Vienne.

Les voies par lesquelles se réalise une langue commune superposée aux parlers locaux sont multiples et embrouillées. L’un des cas les mieux étudiés et les plus curieux est celui du grec ancien. A la date où apparaissent les premiers textes grecs, vers le VIIème siècle av. J.-C., la Grèce est divisée en cités qui constituent autant de petits États autonomes, dont quelques-uns seulement tendent à se réunir en confé-