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Page:Scientia - Vol. IX.djvu/425

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grande partie de mots qui se sont répandus à des dates diverses bien postérieures au Ve siècle ap. J.-C. et que le nombre des vocables d’un patois qui remontent directement au latin, sans aucun emprunt, est petit, On a pu dire qu’on n’est sûr, presque pour aucun mot d’un parler local français, qu’il résulte de la transmission ininterrompue de génération en génération depuis le latin vulgaire jus-qu’à la forme patoise actuelle.

En effet, ce n’est pas seulement la langue commune qui agit sur le parler local. C’est souvent d’abord la langue d’un parler local plus important. Il y a ainsi des croisements presque inextricables d’influences successives ou simultanées. L’hypothèse du développement autonome qu’on a envisagée ci-dessus est presque toujours une simple fiction, commode pour l’étude, et qui fournit une première approximation des faits, mais à laquelle on doit renoncer quand on veut serrer les données de près.

Par suite des groupements partiels qui résultent de ces actions de centres secondaires, ou de l’absence d’un groupe principal et de l’existence d’un certain nombre de centres indépendants, les parlers appartenant à une population où les rapports sont courants, et qui forme en quelque mesure une unité, tendent à présenter des traits communs ; ils forment un dialecte. Les limites des développements autonomes envisagés plus haut sont indépendantes pour chacun des faits particuliers, on l’a vu ; au contraire les limites de faits qui résultent des unifications considérées ici tendent à coïncider les unes avec les autres. Et il se constitue des dialectes bien définis, d’autant plus définis que la vie provinciale a plus de réalité. Le centre de la France, où Paris est la seule ville dominante, n’a pas de dialectes ; le Midi, où il y a des provinces caractérisées, a au contraire des dialectes bien caractérisés aussi : provençal, gascon, dont les limites se laissent tracer avec une certaine netteté. Et l’on retrouve de véritables dialectes en Normandie, en Picardie, en Lorraine, en Franche-Comté.

Totale ou partielle, l’unité linguistique qui se constitue par ces actions diverses n’exprime pas une unité d’origine des populations qui parlent la langue désormais unifiée ; elle traduit l’existence de rapports sociaux importants ayant existé à un certain moment, le sentiment d’une unité de civilisation.

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