Page:Scott - Nain noir. Les puritains d'Ecosse, trad. Defauconpret, Garnier, 1933.djvu/142

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

CHAPITRE VII

Du diable si c’est un puritain, ou autre chose qu’un homme qui se conforme aux temps et aux circonstances.
Shakspeare. La Douzième Nuit.

C’était à l’approche du soir ; Henry Morton aperçut une vieille femme qui, enveloppée de son plaid de tartan s’avançait vers la maison de Milnwood avec un garçon vigoureux, à l’air stupide et niais, sur lequel elle s’appuyait. La vieille Mause fit la révérence, mais ce fut Cuddy qui porta la parole. Il avait préalablement stipulé qu’il en agirait à sa guise ; car, tout en reconnaissant son infériorité d’esprit, et quoiqu’il se soumît généralement aux inspirations de sa mère, il l’avait fait convenir que sa petite dose de bon sens les mènerait plus loin dans les choses de ce monde que toute l’éloquence de la vieille, qui parlait comme un ministre. Il entra donc en matière en ces termes :

— Voici un beau temps pour les seigles, monsieur Henry ; le parc de l’ouest donnera une bonne récolte cette année.

– Je l’espère, Cuddy. Mais qu’est-ce qui vous conduit si tard ici avec votre mère, car je crois que c’est votre mère qui est avec vous ?

— Oui, monsieur Henry. Ce qui l’amène, c’est ce qui fait trotter les vieilles femmes, la nécessité. Nous cherchons du service.

— Du service, Cuddy, à cette époque de l’année ! et par quel hasard ?

Mause ne put se contenir plus longtemps, et, fière de souffrir pour la bonne cause, elle dit avec un air d’humilité et de componction : — Il a plu au Seigneur, monsieur Morton, de nous envoyer une tribulation.

— Les femmes ont le diable au corps, dit tout bas Cuddy à sa mère ; est-ce que vous voulez nous faire fermer toutes les portes à trente milles à la ronde ? — Ma mère est vieille, Monsieur, reprit-il en s’adressant à Henry ; elle s’est oubliée un moment en parlant à Milady, qui n’aime pas à être contrariée ; et personne n’aime à l’être, quand il peut l’empêcher, surtout par ses gens ; M. Harrison l’intendant et M. Gudyil le sommelier ne sont pas bien disposés