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Page:Scott - Oeuvres de Walter Scott, trad Defauconpret, 1836.djvu/413

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C’est là que Roderic s’arrête ; et, se dépouillant de son bouclier et de son plaid, il dit au guerrier des plaines :

— Brave Saxon, fidèle à sa promesse, le fils d’Alpine ne te doit plus rien ; ce meurtrier, cet homme implacable, ce chef d’un clan rebelle, t’a conduit sain et sauf, à travers tous ses postes, jusqu’aux limites de ses domaines ; maintenant c’est en croisant le fer avec lui, seul à seul, que tu vas éprouver la vengeance de Roderic. Me voici sans aucun avantage, armé comme toi d’une seule épée ; tu n’as plus d’autre défenseur que la tienne… nous sommes parvenus au gué de Coilantogle (n).

XIII.

Le Saxon répondit :

— Je n’ai pas l’habitude d’hésiter quand un ennemi me défie l’épée à la main, et d’ailleurs, Chef valeureux, j’ai juré ta mort. Cependant, je l’avoue, ta générosité, ta franchise, et la vie que je te dois, mériteraient une autre récompense… Le sang peut-il seul terminer notre querelle ? n’est-il aucun moyen ?… — Non ! non, étranger ! interrompit le fils d’Alpine ; et pour te rendre toute ta valeur, apprends que le sort des Saxons dépend de ton épée : ainsi l’a décidé le destin par la voix d’un prophète qui dut sa naissance à l’habitant des tombeaux :

— Celui qui le premier versera le sang assurera la victoire à son parti. —

— Hé bien ! répondit Fitz-James, crois-en mon serment ; le mot de cette énigme est déjà trouvé. Va chercher dans la bruyère de ces montagnes le cadavre sanglant de Murdoch : c’est par sa mort que le destin a accompli sa prophétie ; cède donc au destin plutôt qu’à moi. Allons ensemble à Stirling trouver le roi Jacques : là, si tu persistes à vouloir être son ennemi, ou si le monarque refuse de t’accorder ta grâce et ses faveurs, j’engage ma parole que, rendu à tes montagnes, tu seras libre d’y entreprendre la guerre avec tous les avantages que te donne ta position actuelle.

XIV.

De sombres éclairs jaillissent des yeux menaçans de Roderic : — Es-tu donc si présomptueux, s’écrie-t-il, que tu oses proposer à Roderic de rendre hommage à ton roi, parce que tu as immolé un misérable vassal ! Roderic ne cède ni au destin ni aux hommes ; tu ne fais qu’attiser le feu de ma haine ! Le sang de mon vassal demande vengeance… Quoi donc ! tu hésites encore !… J’en atteste le ciel, je change d’opinion sur ton courage, et je reconnais en toi