Aller au contenu

Page:Scribe - Bertrand et Raton, ou l'Art de conspirer, 1850.djvu/30

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
KOLLER, rentrant et restant au fond.

Personne !

RANTZAU, à part.

Tant mieux !

KOLLER.

Et je ne conçois pas par quel hasard ils ont changé de plan.

RANTZAU, à part, souriant.

Le hasard ! les sots y croient tous !

FALKENSKIELD, à Gœlher et à quelques soldats, montrant l’appartement à gauche.

Il n’y a plus que cet appartement.

CHRISTINE.

Le mien ! y pensez-vous ?

FALKENSKIELD.

N’importe, entrez-y !

(Gœlher, Koller et quelques soldats se présentent à la porte de la chambre, qui s’ouvre tout-à-coup et Éric paraît.)


Scène XI.

CHRISTINE, à gauche sur le devant du théâtre et s’appuyant sur la table qui est près d’elle ; ÉRIC, qui vient d’ouvrir la porte à gauche ; GŒLHER, KOLLER, au milieu et un peu au fond ; FALKENSKIELD et RANTZAU sur le devant, à droite.
TOUS, apercevant Éric.

Ô ciel !

CHRISTINE.

Je me meurs !

ÉRIC.

Me voici, je suis celui que vous cherchez.

FALKENSKIELD, avec colère.

Éric Burkenstaff dans l’appartement de ma fille !

GŒLHER.

Au nombre des conjurés !

ÉRIC, regardant Christine qui est près de se trouver mal.

Oui, j’étais des conjurés ! (Avec force et s’avançant au milieu du théâtre.) Oui, je conspirais !

TOUS.

Est-il possible[1] !

KOLLER, redescendant le théâtre.

Et je n’en savais rien !.

RANTZAU.

Et lui aussi !

KOLLER, à part.

Il sait tout ; s’il parle, je suis compromis.

(Pendant cet aparté Falkenskield a fait signe à Gœlher de se mettre à la table à gauche et d’écrire. Il se retourne alors vers Éric, qu’il interroge.

FALKENSKIELD.

Où sont vos complices ? quels sont-ils ?

ÉRIC.

Je n’en ai pas.

KOLLER, bas à Éric.

C’est bien !

(Il s’éloigne vivement. Éric le regarde avec étonnement et se rapproche de Rantzau[2].)
RANTZAU, fait à Éric un geste de tête approbatif et dit à part :

Ce n’est pas un lâche, celui-là.

FALKENSKIELD, à Gœlher.

Vous avez écrit ? (Se retournant vers Éric.) Point de complices ?… c’est impossible ; les troubles dont votre père a été aujourd’hui la cause ou le prétexte, les armes que vous portiez, prouvent un projet dont nous avions déjà la connaissance ; vous vouliez attenter à la liberté des ministres, à leurs jours peut-être ; et ce projet, vous ne pouviez l’exécuter seul.

ÉRIC.

Je n’ai rien à répondre et vous ne saurez rien de moi, sinon que je conspirais contre vous ; oui, je voulais briser le jour honteux sous lequel gémissent le roi et le Danemarck ; oui, il est parmi vous des gens indignes du pouvoir, des lâches que j’ai défiés en vain.

GŒLHER, toujours à la table.

Je donnerai, la-dessus des explications au conseil.

FALKENSKIELD.

Silence, Gœlher ! et puisque monsieur Éric convient qu’il était d’une conspiration…

ÉRIC, avec force.

Oui !

CHRISTINE, à Falkenskield.

Il vous trompe, il vous abuse.

ÉRIC.

Non, mademoiselle : ce que je dis, je dois le dire ; je suis trop heureux de l’avouer tout haut, (avec intention et la regardant.) et de donner au parti que je sers ce dernier gage de dévouement.

KOLLER, bas à Rantzau.

C’est un homme perdu et son parti aussi[3].

RANTZAU, à part et seul à la droite du spectateur[4].

Pas encore ! c’est le moment, je crois, de délivrer Burkenstaff ; maintenant qu’il s’agit de son fils, il faudra bien qu’il se montre de nouveau, et cette fois enfin…

(Il se retourne vers Falkenskield et Gœlher qui se sont approchés de lui[5].)
  1. Christine, toujours à l’extrémité du théâtre à gauche ; Gœlher, qui passe près de la table et s’y assoit ; Falkenkield debout, qui lui dicte ; Éric au milieu et un peu sur le devant du théâtre ; Koller, Rantzau à l’extrémité à droite.
  2. Christine, Gœlher et Falkenskield toujours à la table ; Éric, Rantzau, Koller qui a remonté le théâtre et descend se placer à l’extrémité à droite.
  3. Il remonte et reste au milieu du théâtre sur le deuxième plan.
  4. Pendant cet aparté Falkenskield quitte la table et remonte au fond donner des ordres à Koller et aux soldats, puis il descend ainsi que Gœlher à la droite de Rantzau, au moment où celui-ci achève son aparté.
  5. Position des acteurs : Christine, Éric, Gœlher, Falkenskield, Rantzau. — Koller derrière eux sur le deuxième plan.