Telle est décidément votre déclaration ?
Oui, j’ai conspiré ; oui, je suis prêt à le signer de mon sang ; vous ne saurez rien de plus.
Vous vous perdez, il y va de vos jours.
Qu’importe ? vous ne serez pas compromise, et je vous l’avais juré.
Assurez-vous de lui.
Marchons !
Pauvre jeune homme ! (Prenant une prise de tabac.) Tout va bien.
ACTE QUATRIÈME.
Scène I.
Personne ! personne encore ! Je suis d’une inquiétude que chaque instant redouble, et je ne conçois rien à ce billet adressé par une main inconnue. (Lisant.) « Malgré le contre-ordre donné par vous, un des conjurés a été arrêté hier soir dans l’hôtel de Falkenskield. C’est le jeune Éric Burkenstaff. Voyez son père et faites-le agir ; il n’y a pas de temps à perdre. » Éric Burkenstaff arrêté comme conspirateur ! Il était donc des nôtres ! Pourquoi alors Koller ne m’en a-t-il pas prévenue ? Depuis hier je ne l’ai pas vu ; je ne sais pas ce qu’il devient. Pourvu que lui aussi ne soit pas compromis ; lui, le seul ami sur lequel je puisse compter : car je viens de voir le roi ; je lui ai parlé, espérant m’en faire un appui ; mais sa tête est plus faible que jamais : à peine s’il a pu me comprendre ou me reconnaître. Et si ce jeune homme, intimidé par leurs menaces, nomme les chefs de la conspiration, s’il me trahit. Oh ! non ; il a du cœur, du courage. Mais son père ! son père qui ne vient pas et qui maintenant est mon seul espoir ! Je lui ai fait dire de m’apporter les étoffes que je lui avais commandées, et il a dû me comprendre ; car à présent notre sort, nos intérêts sont les mêmes : c’est de notre accord que dépend le succès.
Messire Raton Burkenstaff, le marchand, demande à présenter des étoffes à votre majesté.
Qu’il entre ! qu’il entre !
Scène II.
Tu vois, femme, on ne nous a pas fait faire antichambre un seul instant ; à peine arrivés, aussitôt introduits.
Venez vite, je vous attendais.
Votre majesté est trop bonne ! Vous n’aviez fait demander que moi ; j’ai pris la liberté d’amener ma femme, à qui je n’étais pas fâché de faire voir le palais, et sur-tout la faveur dont votre majesté daigne m’honorer.
Peu importe, si on peut se fier à elle. (À l’huissier.) Laissez-nous.
Voici quelques échantillons que je soumettrai à votre majesté.
Il n’est plus question de cela. Vous savez ce qui arrive ?
Eh ! non, vraiment ! je ne suis pas sorti de chez moi ; par un hasard que nous ne pouvons comprendre, j’étais sous clef.
Et il y serait encore sans un avis secret que j’ai reçu.
N’importe. Je vous ai fait venir, Burkenstaff, parceque j’ai besoin de vos conseils et de votre appui.
- ↑ Christine, à gauche et sur le devant de la salle ; Eric au fond, emmené par des soldats ; Koller, Gœlher, Falkenskield, au milieu du théâtre ; Rantzau sur le devant à droite.