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piquillo alliaga.


Tous trois se jetèrent dans les bras l’un de l’autre et fondirent en larmes.
Baptista et le lieutenant Barbastro furent soldés, licenciés, et le soir même sortirent de la ville, qui depuis leur départ commença à jouir d’une tranquillité complète.

Une grande partie des rues étaient illuminées. Les bourgeois circulaient d’un air radieux et épanoui, se prélassant dans leur triomphe et se félicitant de la vigueur déployée par la bourgeoisie de Pampelune, vigueur qui assurait à jamais le maintien de leurs fueros. Ginès Pérès de Hila et son compère Truxillo ne pouvaient suffire aux félicitations et aux poignées de mains du quartier, et les deux héros de cette ovation populaire répondaient avec une fierté modeste :

— Que voulez-vous ! quelque pacifique que l’on soit, il y a des occasions où un citoyen doit se montrer !

Alliaga était rentré depuis longtemps au palais du saint-office. Acalpuco, à son poste dans les jardins de l’inquisition, attendait, près de la petite porte, la comtesse d’Altamira, qui, enveloppée de sa mante, parut au second coup de neuf heures.

Elle suivit Acalpuco. Il marchait devant elle et la conduisait, par des détours qu’elle avait déjà parcourus, au cabinet de don Juan de Ribeira, qu’elle connaissait parfaitement.

Elle ouvrit la porte, qui se referma sur elle, et s’avança, d’un pas ferme et dégagé, vers le grand inquisiteur, qui, assis et le front baissé, travaillait devant son bureau. Il leva la tête.

La comtesse poussa un grand cri et s’arrêta immobile : elle venait de reconnaître Piquillo Alliaga.

Il lui fit signe de la main de s’asseoir sur un fauteuil qui était vis-à-vis du sien ; elle balbutia d’un air interdit :

— Pardon, mon frère, je venais pour parler au grand inquisiteur…

— Vous êtes devant lui. Je suis dans ce moment nommé à sa place par les membres du saint-office, mes collègues, et leur choix unanime a été approuvé par le roi. Vous pouvez donc me dire ce que vous aviez à confier au grand inquisiteur.