Page:Scribe - Théâtre, 18.djvu/150

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que vous ne détestez pas les bons morceaux… c’est trop juste… on peut être philosophe et gourmand ; … mais au lieu de recevoir des convives éclairés, depuis que j’y suis, nous n’avons vu paraître âme qui vive… Arrangez-vous, je ne veux pas rester plus long-temps dans cette solitude. Je suis décidé à jeter le froc aux orties… Moi, je perds en ces lieux mon beau talent.

Air de Julie.

Le souvenir de tant de renommée
Me poursuit jusqu’en mon repos ;
Environné d’une noble fumée,
Je revoyais cette nuit mes fourneaux.
D’un air pensif, tenant une lardoire,
Et méditant quelque ragoût nouveau,
Ma main piquait un aloyau,
Et je rêvais encor, la gloire.

RAMIREZ, gravement.

Philippe, nous ne pouvons quitter encore ces lieux.

PHILIPPE.

Et pour quelle raison ?

RAMIREZ.

Le prince le veut, et depuis que j’existe, il ne m’est jamais venu dans l’idée qu’il fût possible de résister à la force de ces quatre mots, le prince le veut.

PHILIPPE.

Eh bien ! le prince a là une singulière volonté.

RAMIREZ.

Tu ne sais donc pas qu’autrefois il a été trahi, par celle qu’il aimait, la comtesse Isabelle, à laquelle il avait tout sacrifié. Alors, dans son désespoir, il m’a