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Page:Scribe - Théâtre, 21.djvu/469

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TIMOTHÉE.

Non, morbleu !… je suis fier de toi, je te respecte, je t’honore… et quand je parle de mon ami Japhet, je suis toujours tenté de dire : Milord !

JAPHET, souriant.

Allons donc !

TIMOTHÉE.

Ce sera ainsi, tu le verras ! Tu es d’une noble famille, c’est certain, c’est positif !… Quand nos vêtemens ne seraient pas là pour nous servir d’indices, nos inclinations seules prouveraient assez la différence de nos conditions… Chez ce vieux curé irlandais, qui nous avait retirés tous deux de l’hospice pour être enfans de chœur, j’étais toujours à courir, à me quereller, à boxer… et toi, à étudier dans ses livres… Et, comme c’était un savant, il t’a pris en affection, il t’a donné de l’éducation, et à moi, il ne me donnait jamais que des commissions, des ouvrages dans la maison… Ça m’allait, ça me convenait, du zèle, de l’activité, du dévouement, voilà ma partie… Des talens, du mérite, voilà la tienne… Aussi, pendant que je ne faisais rien, toi, tu acquérais de la science pour nous deux, de la réputation pour nous deux, de l’argent pour nous deux… Oui, oui, je te dois tout, je ne vis que par toi, et je ne peux pas m’acquitter…

JAPHET.

Allons donc !… est-ce que de ton côté tu ne fais pas ce que tu peux ?…

TIMOTHÉE.

Oui, mais je ne peux rien… je ne peux pas travail-