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Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/103

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Mais il eſt vray que lors qu’Abradate eſt arrivé, je n’ay pû m’empeſcher d’en eſtre faſché : neantmoins comme je ne pouvois remedier à la choſe, j’ay creû qu’il faloit que je me retiraſſe : de peur que ſi le Prince fuſt arrivé, il ne ſe fuſt imaginé que bien loin de l’en advertir, je l’euſſe voulu cacher : ſi bien que je me ſuis oſté des lieux où l’on ſe promene ordinairement, afin de ne le rencontrer pas. Mais, luy dit Doraliſe, ſi vous n’avez point deſſein de nuire à la Princeſſe, que faiſiez vous derriere ces Cyprés, à l’obſerver ſi ſoigneusement ? je taſchois, repliqua t’il, à m’inſtruire en effet de la verité : afin de sçavoir comment je me dois conduire entre Abradate & Mexaris. Leur merite eſt ſi different, repliqua Doraliſe, que ſans me donner la peine de regarder les actions de Panthée je devinerois bien ce qu’elle penſe. Il eſt vray, repliqua Perinthe, mais leur fortune preſente eſt ſi eſloignée l’une de l’autre, que je trouve qu’il y a beaucoup à balancer. Et puis, adjouſta t’il encore, il me ſemble que la belle Doraliſe doit ſouhaitter pour ſon intereſt, que la Princeſſe demeure à la Cour de Lydie, & non pas à celle de Suſe. Cependant, pourſuivit il, je vous conjure de ne me deſcouvrir pas : & de croire que je ne diray ny ne feray jamais rien, qui ſoit contre le reſpect que je dois à la Princeſſe. Doraliſe eſcouta tout ce que luy dit Perinthe, ſans sçavoir ſi elle le devoit croire : car ſi elle ſe ſouvenoit du trouble qu’elle avoit remarqué dans ſon eſprit, lors qu’Abradate eſtoit arrivé, elle ne doutoit point qu’il n’aimaſt Panthée : mais ſi elle conſideroit le peu d’aparence qu’il y avoit, qu’un homme comme luy oſast conſerver dans ſon cœur une paſſion comme celle là, elle adjouſtoit foy à ces paroles.