Cyrus reſpondit encore à ce diſcours, avec une generoſité ſans eſgalle : apres quoy il ſe retira : mais ayant rencontré Doraliſe avec Pherenice dans l’Antichambre, il s’arreſta un moment avec elles, afin de taſcher de sçavoir preciſément quel eſtoit le crime d’Araſpe : n’ignorant pas qu’elles sçavoient toutes deux tous les ſecrets de Panthée. Ce n’eſt pas qu’il n’euſt bien compris à peu prés par le diſcours de cette Princeſſe, quelle pouvoit eſtre la faute d’Araſpe : toutefois pour en pouvoir dire plus aſſuré, il ne vit pas pluſtost ces deux Filles, que les tirant à part, ne me direz vous point, leur demanda t’il, ce qu’a fait Araſpe, qui ait donné ſujet à la Reine de ſe pleindre de luy, apres s’en eſtre tant loüée ? car je voudrois bien auparavant que de le punir, sçavoir un peu mieux que je ne le sçay, en quoy il a failly. Seigneur, reſpondit Doraliſe en ſous-riant, je ne sçay s’il vous ſouvient que je vous dis un jour qu’Araſpe n’eſtoit pas ſi inſensible que vous le croiyez : & que du moins vous pouvois-je aſſurer, que Perinthe l’avoit autrefois paru plus que luy dans un temps où il ne l’eſtoit pourtant pas. je m’en ſouviens fort bien, reprit il ; mais ſeroit il poſſible qu’Araſpe euſt eſté aſſez temeraire, pour lever les yeux juſques à Panthée : & aſſez inſolent, pour luy donner quelques marques de ſa paſſion ? Il a ſans doute eſté aſſez hardy pour l’aimer, reprit Pherenice ; & aſſez malheureux, pour faire que la Reine s’en ſoit aperçeuë. Voila Seigneur, quel eſt le crime d’Araſpe : qui eſt ſans doute aſſez grand, pour vous obliger à donner la ſatisfaction à la Reine de l’eſloigner d’elle. je penſe neantmoins eſtre obligée de vous dire, qu’une vertu moins ſcrupuleuse que la ſienne, auroit pû diſſimuler quelque temps la faute d’Araſpe : qui apres tout l’a ſervie avec un reſpect ſans eſgal.
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