Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/405

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qu’il adore, & qu’ils adorent auſſi bien que luy. C’eſt pour cela, Madame, adjouſta t’il, que j’ay quitté un Deſert où je m’eſtois confiné : que je ſuis venu en Lydie, ſous un autre Nom que le mien : & que je me ſuis déterminé à vous tirer de priſon. Les Dieux ont ſans doute favoriſé mon entrepriſe : & j’ay amené la choſe au point, que ſi vous le voulez, dans trois jours vous ſerez hors d’icy, & dans le Camp de Cyrus. En achevant ces paroles, le Prince Mazare ſouspira malgré qu’il en euſt, d’une maniere ſi touchante, qu’il eſtoit ce me ſemble aiſé de voir qu’il ſe repentoit veritablement : neantmoins la Princeſſe Mandane ne ſe le pût jamais imaginer. Il y avoit pourtant quelques inſtants, où toutes les choſes que luy diſoit ce Prince affligé l’eſbranloient : mais un moment apres, la défiance reprenoit ſa place dans ſon cœur : & faiſoit qu’elle ne pouvoit croire que le Prince Mazare euſt effectivement deſſein de la remettre en liberté. Elle voyoit bien qu’il faloit qu’il euſt une grande & puiſſante intelligence dans la Citadelle : & elle penſoit auſſi que puis qu’il avoit eu aſſez d’adreſſe pour trouver les moyens d’y entrer, il pourroit encore avoir celle de l’en pouvoir faire ſortir. Mais en meſme temps elle croyoit que ce ſeroit pour l’enlever une ſeconde fois, & non pas pour la delivrer veritablement : de ſorte que quoy qu’il luy peuſt dire, elle ne le croyoit point : & luy diſoit touſjours conſtamment, qu’elle aimoit mieux demeurer priſonniere que de le ſuivre comme il le luy propoſoit. Quoy Madame, luy diſoit il, vous ne voulez point me croire, lors que je vous aſſure que je me repens, & que pour reparer mon crime, je veux vous remettre en liberté ! je n’ay pas la force, adjouſtoit