à luy en demander cent choſes, sçachant qu’elle eſtoit Sœur de ſon meilleur Amy. D’abord elle s’informa de ſa Maiſon ; des lieux où il avoit paſſé ſa vie ; de l’amitié qu’il avoit pour Hermogene ; de celle qu’Hermogene avoit pour luy ; & de cent autres choſes, qui teſmoignoient une grande curioſité, pour tout ce qui regardoit Beleſis. Apres que Praſille luy eut reſpondu exactement, à tout ce qu’elle luy avoit demandé, & qu’elle vit que Leoniſe ſe preparoit à luy faire encore de nouvelles queſtions ; mais de grace (luy dit Praſille en riant, qui depuis a raconte toute cette converſation à ſon Frere qui me l’a ditte) aprenez moy un peu par quelle raiſon vous ne voulez aujourd’huy parler que de Beleſis : & pourquoy vous voulez sçavoir juſques aux moindres choſes qui le touchent ? Eſt-ce amour ou curioſité ? Je ne puis en verité, repliqua Leoniſe en raillant, déterminer ſi c’eſt curioſité ou ſi c’eſt amour : mais je sçay touſjours bien que ce n’eſt pas par haine que je m’en informe. Il n’eſt pas croyable auſſi que ce ſoit par amour, reprit Praſille, quoy que je vous l’aye demandé : car vous eſtes trop raiſonnable, pour aimer ſans eſtre aimée, & trop prudente auſſi, pour vouloir faire des conqueſtes au prejudice de Cleodore, qui ne vous le pardonneroit pas. Beleſis eſt donc amoureux de Cleodore ? reprit Leoniſe en rougiſſant ; je penſe, repliqua Praſille, qu’il y a long temps qu’elle n’en doute plus : & que vous eſtes ſeule à Suſe qui ne le sçachiez point. Mais Leoniſe, adjouſta t’elle, d’où vient que vous changez de couleur, quand je dis que Beleſis eſt amoureux ? C’eſt (repliqua Leoniſe, en rougiſſant encore davantage, & ſans avoir le temps de ſonger à ce qu’elle devoit reſpondre) que je penſois qu’il le fuſt
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