Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/156

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

homme que les Dieux vous envoyent, pour vous donner un illustre moyen d’acquerir une gloire immortelle. Si cela est, repartit Cyrus, vous n’avez qu’à me montrer le chemin qu’il faut suivre pour l’aquerir : car quelque difficile qu’il puisse estre, vous m’y verrez aller avec precipitation & avec joye. Je vous l’ay desja dit, respondit Harpage, il ne faut que vous rendre à la teste d’une Armée de trente mille hommes, qui ne font que vous attendre, pour se mettre en campagne & pour vaincre. Ce n’est point, repliqua Cyrus, à celuy qui ne sçait pas encore obeïr, à commander : & ce sera bien assez, que je sois le compagnon de ceux que vous dittes qui me veulent pour leur General. Mais de grace, poursuivit il, genereux Estranger que je pense avoir veû, & que je ne me remets pourtant pas parfaitement ; aprenez moy qui sont ceux qui me veulent faire cét honneur : & ne me cachez pas plus long temps, quels sont ces Amis qu’il faut proteger, & ces Ennemis qu’il faut vaincre. Seigneur, luy respondit Harpage, je ne vous demande rien d’injuste, en vous demandant vostre assistance ; contre un Roy qui a violé toutes sortes de droits, en la personne d’un jeune Prince, qui est l’admiration de tous ceux qui le connoissent. Qui a, dis-je, mesprisé tous les sentimens de la Nature & de la Raison : & qui contre toute sorte de droits, par une jalousie d’ambition mal fondée, luy a voulu faire perdre la vie. C’est pour les interests de cét illustre Prince que je vous solicite : c’est contre cét injuste Roy que je vous anime : & c’est pour vostre propre gloire, que je vous conjure de m’accorder ce que je vous demande. Ce que vous me demandez, respondit Cyrus, est