Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/226

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Pour Artamene, il n’en alla pas ainsi, car il ne sortit du Temple qu’avec elle : non plus que cét autre jeune Estranger, dont j’ay déja parlé plus d’une fois ; que j’observay n’estre pas plus diligent à sortir que nous, & que je vis tousjours devant Mandane. Comme ce Sacrificateur, auquel mon Maistre avoit parlé il y avoit trois jours, l’eut reconnu parmy la presse ; il s’aprocha de luy ; & le voulant favoriser, comme un Estranger curieux ; & comme un homme dont la mine & la conversation luy avoient plû, & luy estoient demeurées dans la memoire ; Si vous voulez, luy dit il tout bas, vous donner un peu de patience, vous pourrez entendre parler la Princesse quand elle sortira, car j’ay quelque chose à luy dire. Artamene ravy de cette heureuse rencontre, remercia ce Mage tres civilement de ce bon office : & se prepara à recevoir un plaisir, qu’il n’avoit pas attendu si tost. Icy encore nostre jeune Inconnu, profitant de l’advis qu’il entendit donner à mon Maistre, commença de s’aprocher du Sacrificateur, avec un empressement estrangge. La Princesse s’estant donc levée pour s’en aller ; comme elle fut assez prés de la porte du Temple, ce Sacrificateur s’approcha d’elle, suivy de mon Maistre, comme mon Maistre de nostre Estranger ; & la supplia de vouloir employer son credit, pour obtenir du Roy son pere, que dans la guerre que l’on alloit entreprendre, l’on apportast un soin particulier, à la conservation des Temples. Car Madame, luy dit il, les Dieux sont les Dieux de tous les Hommes : la Capadoce à des Autels, aussi bien que le Pont en a : & comme la Victoire peut changer de Party, il ne faut pas enseigner aux Ennemis, à commettre des Sacrileges : ny s’attirer sur les bras des Dieux irritez, pensant n’avoir