Aller au contenu

Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/237

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tué, si Artamene ne l’eust paré avec son espée : & sans perdre temps ne l’eust enfoncée jusqu’aux gardes, dans le corps de ce temeraire, qui tomba mort à ses pieds. Le Roy qui vit cette action, l’appella son Liberateur : Mais mon Maistre voyant qu’un pareil malheur pouvoit encore arriver ; sans cesser de combattre, & sans perdre moment de temps, s’osta son habillement de teste, & le mit sur celle du Roy : se servant de son Bouclier, pour se garantir des coups qu’on luy vouloit porter. Cette action qui fut veuë des Amis & des Ennemis, fit des Effetr differents : le Roy en fut surpris ; & voulut s’oster le Casque qu’Artamene luy avoit donné, pour le luy rendre. Mais les Ennemis voyant mieux qu’ils ne faisoient auparavant, l’admirable beauté d’Artamene, & cette fierté guerrerie, qui luy donnoit si bonne mine dans les Combats ; ils creurent que c’estoit quelque Divinité, qui venoit sauver leur Ennemy : & contre laquelle, il n’y avoit pas moyen de resister. Leurs efforts commençant donc de s’alentir peu à peu, ils lascherent le pied ; & tout d’un coup prenant l’espouvante & la fuite, Artamene les poursuivant, & eux se renversant sur l’aisle gauche de leur Armée, qu’ils mirent toute en desordre ; il les eust absolument deffaits, si la nuit ne fust survenuë : & n’eust obligé tous les deux Partis à se retirer sous leurs Enseignes. Philidaspe quoy qu’il ne fust pas present à tout ce qui s’estoit passé, n’avoit pas laissé de contribuer quelque chose, à l’heureux succés de cette grande action : car de l’adveu mesme des Capadociens, ce fut luy qui empescha nostre Aisle droite de plier : & qui combatit la gauche des Ennemis, pendant que nous estions occupez à delivrer le Roy : si bien que si