Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/262

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du Roy son Pere : si bien qu’en ayant eu la permission, elle arriva dans Anise, le jour auparavant que l’on deust choisir ceux qui devoient combatre.

Je vous laisse à juger Seigneur, avec qu’elle ardeur tous ceux qui avoient du courage, & qui estoient piquez d’un puissant desir de gloire, solicitoient en cette occasion : & je vous laisse à juger encore, si Artamene & Philidaspe entre les autres, estoient des plus empressez. Ce dernier esperoit en la faveur d’Aribée qui le protegeoit : & mon Maistre dans l’extréme envie qu’il avoit d’estre du nombre des Combatans, n’osoit s’assurer à rien. Car encore qu’il eust rendu un grand service au Roy, & que sa valeur eust desja esté assez connuë : neantmoins parce qu’il estoit Estranger, il craignoit plus qu’il n’esperoit ; & jugeoit bien que ce luy estoit un grand obstacle. Je voyoit cependant, que s’il n’estoit pas de ce Combat, toutes ses esperances s’en alloient bien reculées. Car, disoit il, que pourray-je faire, pour acquerir l’estime de la Princesse, dans une Cour tranquile, & où je ne pourray jamais trouver d’occasions de la servir ? Du moins si je pouvois aider à emporter cette victoire, j’aurois toujours quelque leger sujet d’esperer. Mais helas ! je ne suis pas assez heureux pour cela ; & je crains bien mesme, que Philidaspe ne me soit preferé, quoy qu’il soit Estranger aussi bien que moy. Car Seigneur, c’estoit une chose inconcevable de voir combien ces deux jeunes & braves Guerriers, se regardoient tousjours en tous leurs desseins, sinon avec envie, du moins avec une emulation extréme. Ainsi la Princesse ne fut pas plustost arrivée, qu’Artamene se determinant tout d’un coup, fut la trouver sans m’en rien dire : & comme il y avoit alors