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Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/407

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des plus magnifiques, & des plus agreables Villes du Monde. J’y arrivay, Seigneur, quelques jours apres qu’Astiage eut reçeu la nouvelle de la mort du jeune Cyrus, fils du Roy de Perse, & de la Princesse sa fille : Or il y a desja trop long temps que vous estes en Capadoce, pour n’avoir pas sçeu ce qui s’est passé en Medie : & pour avoir ignoré les menaces des Dieux ; les frayeurs d’Astiage ; & la joye qu’il eut de croire, que le repos de toute l’Asie estoit solidement estably, par la perte d’un Prince, que l’on dit qui promettoit des grandes choses. Je revins donc à la Cour en une saison de festes & de resjoüissances : & j’y fus sans doute quelque temps, avec toute la douceur imaginable. Le Roy ne faisoit pas une Chasse que je n’en fusse : il ne se faisoit pas une assemblée de Dames que je ne m’y trouvasse : j’aimois la magnificence des habillemens ; je me divertissois aux promenades ; & comme vous sçavez que le Palais du Roy, & les Jardins d’Ecbatane, sont la plus belle chose du monde ; il n’y avoit point de jour, qui ne me fournist un nouveau plaisir. Le Roy me faisoit l’honneur de me considerer, plus que je ne le meritois : je m’estois fait aimer de tous les jeunes gens de la Cour ; & si je l’ose dire, toutes nos Dames ne me haïssoient pas : Car comme je n’avois qu’un dessein general de plaire à tout le monde ; il eust esté assez difficile, que j’eusse beaucoup despleu à quelqu’un.

Je joüissois donc de la jeunesse & de la liberté, avec une satisfaction extréme : lors qu’Artambare, qui comme vous sçavez peut-estre, avoit autrefois esté amoureux de la Reine de Perse, avant qu’elle fust mariée avec Cambise Pere de Cyrus dont j’ay parlé : & qui s’estoit esloigné de la Cour pour ce sujet, & marié depuis en la Provinces