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Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/551

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ce que j’estois devenu. Elles n’avoient pourtant garde de le sçavoir, puis que je me cachois avec beaucoup de soin : dans l’intention que j’avois, de donner de mes nouvelles à Megabise. En effet, la pointe du jour ne commença pas plus tost de paroistre, que je luy envoyay un homme avec un Billet : qui luy aprenant l’intention que j’avois de me battre contre luy, pour des raisons qu’il pouvoit aisément deviner : luy disoit encore, que cét homme le conduiroit au lieu où je l’attendois avec une espée. Mais le hazard voulut, que lors que celuy que j’envoyois à Megabise arriva chez luy, il y avoit desja du monde : parce que le Roy devant aller à la chasse ce jour là, trois des ses Amis l’estoient allé prendre, afin de se rendre au lever d’Astiage. Ce Billet que j’avois escrit, ne pût donc estre rendu si adroitement, que l’on ne s’en aperçeust, & que l’on ne soubçonnast quelque chose de la verité : de sorte qu’il fut impossible à Megabise de me satisfaire. Artabane ayant entendu quelque bruit de ce qui estoit arrivé, en advertit le Roy, qui donna ordre que l’on arrestast Megabise : & qui commanda que l’on me cherchast ; paroissant fort en colere contre moy. Mais admirez Seigneur, comme la Fortune se jouë des destins des hommes ! quoy que ce fust moy qui eust envoyé apeller Megabise, il n’y eut pourtant presque personne dans la Cour qui le creust ainsi : & le bruit s’épandant d’abord que Megabise & Aglatidas s’estoient voulu batre ; comme il y avoit aparence qu’ayant tué son Frere, ce devoit estre luy qui m’eust fait apeller, tout le monde le dit cette sorte : à la reserve de ceux qui s’estoient trouvez chez luy, & qui luy avoient vû recevoir mon Biller. Mais pour Amestris, elle crût en effet que c’estoit Megabise qui m’avoit