Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/198

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en deux petits bras, dont l’un passoit tout le long d’une des faces de cette Ville portative : & l’autre la traversoit par le milieu : se rejoignant apres un peu plus bas comme auparavant. Nous vismes que le Pavillon de la Reine estoit au milieu d’une grande Place, ou quatre grandes rües aboutissoient, avec des Gardes aux deux bouts de toutes les quatre. Enfin Seigneur, l’on conduisit mon Maistre dans une superbe Tente, destinée pour les Ambassadeurs des Rois Estrangers. Comme le train & l’equipage d’Artamene estoit extrémement grand & magnifique, ces Peuples là n’avoient pas moins de curiosité de nous regarder, que nous en avions de les voir. Car corne l’habillement des Medes est beaucoup plus beau que celuy de tout le reste de l’Asie, Ciaxare avoit voulu que nous eussions tous des robes à la Medoise, toutes couvertes d’or : & celle d’Artamene estoit toute semée de pierreries. Comme nous estions armiez apres midy, le reste du jour fut employé à se reposer : & ce ne fut que le lendemain au matin que Thomiris donna audience à mon Maistre. J’avois oublié de vous dire, qu’en envoyant recevoir Artamene, Thomiris luy avoit aussi envoyé un Truchement, qui sçavoit toutes les Langues Asiatiques : mais pour elle, mon Maistre n’en eut pas besoin, car elle sçavoit la Langue Assirienne : qui comme vous ne l’ignorez pas, est la plus generalement entendüe par tout : & qu’Artamene sçavoit assez bien, parce qu’elle ressemble fort à celle de Capadoce. De sorte que mon Maistre ayant esté adverty qu’elle la sçavoit, se prepara à luy parler en cette Langue : aussi tost qu’il auroit fait son premier compliment en celle de Capadoce, pour garder quelque ceremonie : & pour rendre ce respect là au Roy de qui il estoit envoyé.