Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/201

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’il estoit, fut contraint d’adjoüer apres, qu’excepté Mandane (qui certainement estoit encore infiniment plus accomplie) il n’avoit jamais veû de beauté plus esclatante, que celle de Thomiris. Cette Reine se leva, dés qu’elle aperçeut mon Maistre : & descendit mesme le premier degré de son Throsne. Cette Balustrade d’or que l’on ouvrit par le milieu, fit que mon Maistre s’avança jusqu’au bas de ce Throsne : & que mettant le pied sur la derniere marche, il luy baisa la robe, & luy presenta des Tablettes toutes couvertes de Diamants, où estoit la Lettre de Ciaxare : luy disant en peu de mots, & en Capadocien, le sujet de son Ambassade. Elle respondit en sa langue, mais fort peu de chose ; & prenant ces Tablettes, elle les donna au Capitaine de ses Gardes, qui les remit entre les mains du Truchement. Apres cela, elle se remit à sa place : & mon Maistre prit celle qui estoit destinée pour luy a la droite du Throsne, & au delà de la Balustrade. Vous sçavez. Seigneur, que ces especes de depesches, ne servent qu’à authoriser celuy qui les porte : & qu’en ces premieres Audiences, l’on ne parle jamais gueres à fond des affaires qui amenent les Ambassadeurs. Apres donc que pour la ceremonie cette Lettre de Creance eut esté leve, & expliquée à la Reine : & que chacun, comme je l’ay dit, eut commencé de parler en la langue de son Païs ; Artamene fut fort estonné d’entendre que Thomiris luy dit en Assirien. Je ne suis pas peu obligée au Roy de Capadoce, de m’avoir fait connoistre un homme de qui la reputation m’avoit donné une si forte curiosité : car ne pensez pas, luy dit elle, que la Renommée ne passe jamais l’Araxe, pour nous aprendre ce que l’on fait aux lieux d’où vous venez. Vous sçavez qu’elle traverse