Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/361

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

fait, s’en alla à Pterie, dont Aribée eſtoit Gouverneur, où il demeure touſjours caché : reſolu d’attendre en ce lieu là, une occaſion plus favorable. Ce fut donc pour l’amour de luy, qu’Aribée voulant eſloigner Artamene de la Cour, comme eſtant le plus grand obſtacle à ſes deſſeins ; propoſa à Ciaxare, de l’envoyer vers la Reine des Maſſagettes, afin d’executer ſon entrepriſe pendant ſon abſence. Il arriva pourtant une choſe qui l`embarraſſa fort ; qui penſa le deſesperer ; & qui luy fit bien perdre du temps : qui fut qu’auſſi toſt apres qu’Artamene fut party, Philidaſpe sçeut que ce Gouverneur qui luy devoit donner retraite dans la Ville d’Iſſus eſtoit mort : ſi bien qu’il falut chercher un autre Azile, auparavant que de rien entreprendre : ce qui dura ſi long temps, qu’il ne pût executer ſon deſſein, que lors que l’on ne faiſoit plus qu’attendre Artamene ; duquel l’on n’avoit point eu de nouvelles depuis ſon depart. Le Gouverneur d’une Ville qui s’apelle Opis, & que le fleuve du Tigre traverſe, ayant donc eſté gagné ; Aribée qui avoit ſuborné une de mes Compagnes, nommée Arianite : & qui de plus avoit gagné preſque tous les Gardes de la Princeſſe, executa ſon entrepriſe à Themiſcire, où Philidaſpe s’eſtoit rendu ſans danger. Car outre qu’il n’alloit que de nuit, il eſt encore vray qu’il s’eſtoit ſi fort changé le taint par une invention qu’on luy avoit donnée, qu’il n’eſtoit pas connoiſſable.

Enfin Chriſante me voicy arrivée a l’endroit de mon recit, où tout ce que j’ay à vous dire vous eſt inconnu : Mais de grace imaginez vous bien quelle fut la ſurprise & le deſespoir de la Princeſſe, de ſe voir enlevée par Philidaſpe. Il fut ſi grand, que je creus qu’elle en expireroit de douleur :