Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/552

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les choſes dans le cœur de Policrite, lors que Philoxipe arriva aupres d’elle : d’abord qu’elle le vit, elle voulut reprendre le chemin de ſa petite Cabane : mais s’eſtant avancé en diligence, il l’en empeſcha. Neantmoins comme elle n’en eſtoit qu’à quinze ou vingt pas, & qu’il y avoit deux femmes qui la ſervoient, qui travailloient dans un petit Pré aſſez aproche d’eux, elle s’arreſta : & Philoxipe prenant la parole ; Quoy Policrite luy dit il, vous fuyez un Prince qui fuit tout le monde pour l’amour de vous, & qui ne cherche que vous ? Seigneur (luy dit-elle, avec je ne sçay quel air un peu plus imperieux qu’auparavant, bien qu’elle n’en euſt pas le deſſein) je fais ce que vous devriez peut-eſtre faire : car enfin, quel avantage pouvez vous eſperer de vos viſites & de vos ſoings ? Celuy d’entendre dire de voſtre belle bouche, reprit il, que je ne ſuis pas haï de vous. S’il ne faut que ce la, repliqua t’elle, pour vous fatiſfaire, il ne fera pas difficile d’en venir à bout : Mais n’en de mandez pas davantage, ſi vous ne voulez eſtre refuſé. Quoy aimable Policrite, reprit Philoxipe, vous ne m’aimerez jamais ; & tout ce que je fais pour meriter voſtre affection, fera fait inutilement ? Non, cela n’eſt pas poſſible : quand meſme vous feriez auſſi inſensible que les Portraits que j’ay de vous. Les Portraits que vous avez de moy ! reprit Policrite, Ouy, adjouſta Philoxipe, je ne ſuis pas ſi malheureux que vous penſez : & ſans voſtre conſentement, & malgré vous, j’ay tous les jours le plaiſir de vous voir. Ha, s’écria Policrite, je voy bien Seigneur, que Mandrocle m’a trahie, & qu’il m’a manqué de parole. Philoxipe luy demanda alors, comment elle avoit connu Mandrocle ? & elle luy aprit