Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/176

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que vous faites à quelques autres. Mais Madame, luy reſpondit elle en riant, ne m’avez vous pas dit qu’il ne faloit point que Philocles s’en retournaſt Eſclave à Corinthe ? Ouy, repliqua la Princeſſe ; mais je ne veux pas qu’il s’en aille mal ſatisfait de Jaliſſe : c’eſt pourquoy ſi vous me voulez obliger, encore une fois Philiſte, ſoyez un peu plus égale en vos civilitez. Philiſte rougit à ce diſcours : car elle comprit bien que la Princeſſe l’accuſoit adroitement de quelque complaiſance pour Antigene : neantmoins faiſant ſemblant de ne s’en apercevoir pas, elle luy dit ſimplement qu’elle apporteroit ſoing à ſe corriger : & en effet je fus quelques tours que je la trouvay un peu plus civile. Et comme je ne sçavois pas encore le diſcours que la Princeſſe luy avoit fait, j’eus une joye extréme de ce changement : & Antigene qui n’eſtoit pas moins amoureux de Philiſte que moy, en eut un deſplaisir fort ſensible. Comme il avoit eu pluſieurs occaſions de luy parler, il avoit deſja eu quelques converſations particuliers avec elle : où à mon advis il luy avoit fait comprendre une partie de ſes ſentimens : mais pour moy il ne m’avoit pas eſté poſſible d’en faire autant. Pendant cét heureux intervale où elle fut un peu plus complaiſante, ayant trouvé moyen de l’entretenir à une promenade, je me reſolus de ne perdre pas un temps ſi precieux : de ſorte qu’à la premiere occaſion qu’elle me donna, de pouvoir changer la converſation indifferente, en une un peu plus particuliere ; Eſt il poſſible, luy dis je, belle Philiſte, que vous ne vous ſoyez pas oppoſée au bonheur dont je joüis preſentement ; Et avez vous pû vous reſoudre enfin à connoiſtre Philocles pour ce qu’il eſt ? c’eſt à dire (pourſuivis-je, ſans