Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/276

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donné à celuy qui l’avoit perdu. Theanor ſe voyant alors preſſé, par l’extréme envie qu’il avoit d’eſtre eſclaircy de ce que je luy avois dit sçavoir de l’amour de Polycrate pour Alcidamie : & par la honte auſſi de m’avoüer qu’il m’euſt dit un menſonge, ſe reſolut d’en dire un autre, qui confirmaſt le premier, & qui ſervist à ſon deſſein. Il dit me donc (apres avoit eſté quelque temps ſans parler, comme s’il euſt eu peine à ſe reſoudre de me faire cette confidence. & apres m’avoir fait jurer ſolemnellement que je n’en parlerois jamais) que Polycrate eſtoit amoureux d’Alcidamie, il y avoit tres long temps. Que cette amour eſtoit meſnagée par une Perſonne de la Cour, qui ſe nommoit Meneclide, que tout le monde croyoit que Polycrate aimoit, mais qu’elle n’eſtoit que la Confidente de l’autre. Qu’Alcidamie, quoy que tres vertueuſe, reſpondoit touteſfois à cette paſſion avec beaucoup de complaiſance : & qu’en fin le Portrait dont il s’agiſſoit, eſtoit un Portrait donné, bien qu’il paruſt eſtre un Portrait dérobé. Et comment, dis-je en l’interrompant, cela eſt il poſſible ? c’eſt, me dit il, que Polycrate devant faire un voyage, ſupplia Alcidamie de luy donner ſa Peinture, à quoy elle conſentit neantmoins comme elle ne vouloit pas ſe faire peindre en ſecret, de peur que cela eſtant deſcouvert ne paruſt trop miſterieux : elle fit ſemblant de vouloir donner ſon Portrait à Acaſte : avec intention d’en faire faire deux à la fois. Mais le Peintre eſtant tombé malade comme il n’y avoit encore que celuy qui eſtoit pour Acaſte qui fuſt achevé ; & le départ de Polycrate preſſant, Alcidamie donna ce Portrait à Acaſte, n’oſant pas faire autrement apres le luy avoir promis. Mais le Prince eſtant allé chez Acaſte