Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/335

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que luy : puis que vous eſtes trop genereux, pour ne proteger pas la plus malheureuſe Princeſſe de la Terre. Cyrus eſtoit ſe affligé de voir qu’il n’avoit pas delivré Mandane, & ſe ſurpris d’apprendre que cette ceſſe que luy parloit eſtoit Sœur du Roy de Pont ; qu’il fut un moment ſans pouvoir preſques luy reſpondre : neantmoins faiſant un grand effort ſur. ſon eſprit ; Vous ne vous trompez pas Madame, luy dit il fort civilement, quand vous croyez que je vous traiteray avec tout le reſpect que l’on doit à une perſonne de voſtre condition : car encore que le Roy voſtre Frere ſoit celuy que je viens chercher en Armenie, je ne laiſſeray pas de vous aſſurer, que je vous rendray touſjours tous les ſervices qui ſeront en ma puiſſance. Comme cet te belle Princeſſe alloit reſpondre, on vint advertir Cyrus qu’il ſortoit d’Anaxate une multitude de monde ſi prodigieuſe, que ſa preſence eſtoit neceſſaire à ſon Armée : Souffrez donc Madame (luy dit il, en luy preſentant la main) que je vous remene dans voſtre Apartement : & que je vous laiſſe Maiſtresse de ce Chaſteau, juſques à ce que j’aye achevé d’aſſurer cette petite Conqueſte. En diſant cela il la conduiſit dans ſa Chambre : où apres luy avoir fait encore un compliment, avec aſſez de precipitation : & avoir commandé à Chriſante qu’il y laiſſa, de la ſervir en tout ce qu’il pourroit : il deſcendit dans la Court, où il rencontra quelques Soldats & quelques Capitaines qui portoient dans ce Chaſteau le Prince Artibie bleſſé, afin de l’y faire penſer plus commodément. Comme Cyrus le vit en cét eſtat, & qu’il remarqua que ceux qui le ſoutenoient trop foibles, & l’incommodoient en le portant : quel que preſſé qu’il fuſt, &