vanger ſur moy, des ſuplices que voſtre froideur fait ſouffrir au Prince Spitridate : & ſoyez luy enfin auſſi favorable, que vous voulez qu’elle me la ſoit. La Princeſſe rougit au diſcours du Prince Sinneſis : & ne sçachant s’il parloit ſincerement, ou ſi ce n’eſtoit que pour deſcouvrir ſes ſentimens ; en verité, dit elle, vous m’avez ſi fort ſurprise, que je ne sçay preſques que vous reſpondre. Car je ſuis ſi peu perſuadée de la ſouffrance de Spitridate, que ſi voſtre mal n’eſt pas plus grand que le ſien, je ne juge pas qu’il ait beſoin d’un remede ſi extraordinaire que celuy que vous me propoſez. Non non ma Sœur, luy dit il, vous ne croyez pas ce que vous dites, & vous ne le devez en effet pas croire : Spitridate vous aime juſques à l’adoration, car je le luy ay fait advoüer aujourd’huy à la chaſſe mal gré qu’il en ait eu. Spitridate, reprit elle toute confuſe, ne pouvoit pas choiſir un meilleur Confident. Je l’advouë (reprit le Prince Sinneſis, ſans luy donner loiſir de l’interrompre) car il eſt vray que ſi vous me voulez obliger, vous le traiterez mieux que vous n’avez fait juſques icy. Mais Seigneur, dit elle, puis que vous eſtes en ſi grande ſocieté avec Spitridate, il n’eſt pas beſoin que je me meſle de vos affaires, & vous les ferez bien ſans moy : Cruelle perſonne, luy dit il, pourquoy me parlez vous de cette ſorte ? & ne sçavez vous pas bien qu’un ſeul de vos regards perſuadera plus puiſſamment Spitridate, que ne feroient toutes mes paroles ? Enfin ſi vous ne voulez me deſobliger, vous ſouffrirez ! a paſſion d’un Prince qui vous merite mieux qu’aucun autre : & qui a ſans doute toutes les qualitez neceſſaires pour eſtre choiſi de vous, & pour l’eſtre meſme du Roy. Et puis, adjouſta t’il en ſous-riant, je ne me connois pas ſi
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