n’aura pas changé les ſiens : & il ſemble preſques indubitable, que puis que Spitridate paroiſt eſtre bien aveques luy, il faut qu’il ne ſoit plus ce qu’il eſtoit. Ha, Madame, luy dis-je, il ne faut pas le condamner ſans l’entendre : il y a pourtant bien de l’apparence, me reſpondit elle, que je ne me trompe pas : une auſſi longue abſence qu’a eſté la ſienne, peut aiſément l’avoir guery de la paſſion qu’il avoit pour moy ; & la poſſession de deux Royaumes, peut eſtre facilement preferée à celle d’une Princeſſe, qu’il y a ſi long temps que l’on n’a veuë, & qui n’a que l’infortune en partage. Enfin Heſionide, ſi Spitridate eſt fidelle, c’eſt un miracle : & s’il ne l’eſt pas, c’eſt ſans doute le plus grand malheur qui me puiſſe arriver. Ainſi ne sçachant ſi je dois faire des vœux pour luy ou contre luy ; ne sçachant, dis-je, s’il vient me delivrer, ou me faire ſa priſonniere : j’ay l’ame en une inquietude que je ne puis vous faire concevoir. Je fis alors tout ce qui me fut poſſible, pour diminuer ſa crainte, & pour fortifier ſon eſperance : mais à vous dire le vray, je penſe qu’elles regnerent ſuccessivement dans ſon cœur durant pluſieurs jours, & qu’elle ne demeura pas bien d’accord avec elle meſme. Cependant Artane eſtoit bien empeſché : le nom de Spitridate, de qui il sçeut le retour augmenta ſa frayeur : & toute la force de ſon amour, ne l’en pût jamais garantir. comme il avoit de braves gens aveques luy, ils l’obligerent malgré qu’il en euſt, à aller au devant de leur ennemy, & à ſe reſoudre de hazarder une Bataille. Il s’y oppoſa quelque temps : mais enfin craignant ſans doute que s’il deſcouvroit toute ſa laſcheté ils ne l’abandonnaſſent, il y conſentit, & ſe reſolut meſme d’y eſtre. De ſorte que toutes
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