ny glorieux : j’rriterois l’eſprit du Roy mon Frere ; vous irriteriez encore davantage celuy d’Arſamone ; & nous nous expoſerions à mille malheurs inutilement. Souffrez donc, dit il, que ſans me déguiſer & ſans vous bannir, j’aille aveques vous aupres du Roy de Pont : Quand il ſeroit capable de vous bien recevoir, reſpondit elle, ce ne ſeroit aſſurément qu’à condition, que vous porteriez les armes contre le Roy voſtre Pere ; ce que vous ne feriez pas ſans doute ; & ce que je ne vous conſeillerois pas de faire : ainſi Spitridate, il faut me quitter. Il faut vous quitter Madame ! reprit il avec une douleur extréme ; Ouy, adjouſta t’elle, & ſi la raiſon ne ſuffit pas pour vous y obliger, j’y joindray mes prieres, & meſme mes commandemens : car en fin ma gloire le veut, & voſtre propre intereſt le demande. Vous avez cét avantage, pourſuivit elle, qu’en l’eſtat qu’eſt ma fortune, vous n’aurez gueres de Rivaux. Ha Madame, s’écria Spitridate, en vous oſtant des Couronnes, on ne vous a pas oſté une beauté ſans égale ; un eſprit incomparable ; & une venu ſans ſeconde. Ainſi, Madame, je dois touſjours tout aprehender : principalement sçachant que le Roy voſtre Frere vous parlera continuellement contre moy. Ne regardez pourtant jamais Spitridate comme le Fils d’un Uſurpateur : mais regardez le touſjours comme un Prince qui ne ſera jamais Roy, qu’il ne remette auſſi toſt une Couronne dans voſtre Maiſon, & qu’il ne vous en donne une autre. Je vous l’ay deſja dit, & je vous le redis encore : vous regnerez, Madame, ou je ne regneray point : c’eſt pourquoy ayez, s’il vous plaiſt, l’equité de donner du moins quelque aſſurance d’affection, à un
Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/514
Apparence