Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, troisième partie, 1654.djvu/515

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homme qui vous conſacre tous les momens de ſa vie. Ne me banniſſez pas d’aupres de vous, ſans m’aſſurer que je demeureray dans voſtre cœur ; & que rien ne m’en pourra chaſſer : car ſans cela, Madame, je ne sçaurois vous obeïr. Je vous promets, luy dit elle, de faire valoir voſtre generoſité aupres du Roy mon Frere, le plus qu’il me ſera poſſible : & de me ſouvenir eternellement du commandement que me fit en mourant le Prince Sinneſis, de conſerver pour vous toute ma vie une affection toute entiere. Le puis-je eſperer Madame ? interrompit ce Prince affligé ; Je ſerois bien injuſte & bien ingratte, repliqua t’elle, ſi j’y manquois, tant que vous agirez comme vous faites : Et puis cette affection eſt ſi pure & ſi innocente, qu’il y auroit plus de crime à la combatre qu’à la conſerver. Je ne sçay Madame, adjouſta t’il, ſi j’oſerois vous dire que je la trouve un peu foible : Je ne sçay Spitridate, interrompit elle, ſi j’oſerois vous advoüer qu’elle me ſemble un peu trop forte : & qu’ainſi vous avez tort de vous pleindre. Mais Madame, reprit il, que faites vous pour moy, & que ne fais-je pas pour vous ? Vous faites toutes choſes, reſpondit elle, je ne le sçaurois nier : Mais puis qu’en ne faiſant rien pour vous, je fais pourtant tout ce que je puis, & meſme peut-eſtre plus que je ne dois, vous devez eſtre ſatisfait. Eh bons Dieux, divine Princeſſe, adjouſta t’il encore une fois, que faites vous que je puiſſe expliquer à mon advantage ? Je vous monſtre ma douleur, reſpondit elle, que je vous pourrois cacher : je vous permets de lire dans mes yeux, les ſentimens de mon ame : & je ſouffre enfin que vous croiyez que je vous prefereray toute ma vie dans mon cœur, à tout le reſte