Page:Segalen - Les Immémoriaux.djvu/265

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Iéhova — C’est le soir, c’est le soir des dieux. »

Docilement, avec toute la foule, Térii ou Iakoba, devenu mamaïa lui-même, répond à tous les appels. Sa voix n’est plus la sienne ; il la disperse au hasard des autres voix. Son corps, aussi hagard que ses paroles, chancelé et continue d’étreindre des femmes ; mais il ne les rassasie plus. Enfin, il désire étendre ses épaules, et s’assoupir : la nuit blêmit. L’aube point.

D’un effort, il se leva : quel danger à se laisser connaître par ces Mamaïa dont il avait surpris le culte et les abominations ! Il dévala vite le sentier si péniblement gravi, aperçut des porteurs-de-bananes et se mêla parmi eux. Il remémorait : « le chef des « hérétiques » ? Téao tané. Leurs paroles ? exterminer les chrétiens. Leurs actions ? enlacer des femmes en dehors du « mariage », comme avait dit Noté. » Aucun doute sur tout cela : ces tapu qu’on venait d’inventer, cette Loi nouvelle que l’on attendait d’un jour à l’autre, pourraient châtier ces impies, maintenant qu’il les avait épiés et surpris. Le chrétien se réjouit de montrer ainsi son zèle. Les Missionnaires seraient contents.