noux la nuque du manant, afin de ne pas vaciller en arrière. La foule s’écarta. Les messagers étalèrent des nattes. L’Arii prit pied, de la sorte, sans toucher la terre indigne.
Alors il dévisagea les hommes blêmes, qui lui rendirent tous ses regards. Ils s’étonnaient sans doute qu’un chef se montrât si différent des autres chefs, avec cette peau noirâtre, ces lèvres grosses, ce nez écrasé, et sans rien de la majesté d’allure coutumière aux vrais Arii de Papara ! — Nul ne parlait. On s’observait ainsi que des guerriers avant le premier coup de fronde. Pomaré considérait à la dérobée le navire. Haamanihi surprit sa curiosité, et tout aussitôt cria par noblesse, en langage tahiti :
— « Le grand Arii veut quitter ses demeures semblables aux Nuages, et voler, sur l’Arc-en-ciel, jusqu’à la pirogue étrangère. Ainsi l’ordonne le Tonnerre de sa voix. »
Puis il avoua — avec une moindre dignité :
— « Celui-là veut aller sur votre pirogue… »
— « Bien », dit le chef des étrangers, « qu’il nous accompagne là… » Il montrait un bateau creux et rond, fort petit.
— « Non ! » Les pieds sacrés ne pouvaient effleurer que la pirogue sacrée, l’Arc-en-ciel. Elle reposait au fond de la baie sous des abris frappés de tapu. À tout hasard, des pêcheurs en lancèrent une autre : il suffisait de la consacrer sous le même nom pour lui donner les mêmes prérogatives. Pomaré consentit