Page:Segrais - L’Énéide (Tome 1), 1719.djvu/103

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Là (car pour soulager une amitié si tendre,
Je veux bien du destin les grands secrets t’apprendre)
Il sera le vainqueur de cent peuples vainqueurs ;
De cette gent farouche adoucira les mœurs
Avant que trois moissons jaunissent les campagnes,
Avant que trois Hivers blanchissent les montagnes.
Ascagne son espoir, et son sang généreux,
Qui d’Iule aujourd’hui porte le nom heureux,
Laissera Lavinie encore en sa naissance,
Et sur Albe la Longue étendra sa puissance,
Pendant que trente fois le bel astre du jour,
Par son oblique route accomplira son tour.
Le sang du grand Hector au gré des destinées,
Dans Albe ayant régné par trois fois cent années,
La Vestale féconde engendrera de Mars
Les gémeaux premiers Chefs d’un peuple aux champs épars.
Nourrisson d’une louve, et fils de la Vestale,
Romule fondera la ville Martiale,
Nommera de son nom ce peuple belliqueux,
Et ce peuple partout rendra son nom fameux.
Sa grandeur par les mers ne sera point bornée ;
Les ans ne verront point sa gloire terminée.
Celle à qui ces Romains ont causé tant d’ennui,
Qui ciel, et terre, et mer bouleverse aujourd’hui,
Junon changeant sa haine en malheurs si féconde
Les verra sans regret maîtres de tout le monde.
Tel fut, tel est mon ordre ; et le beau jour luira
Que la superbe Argos à son tour gémira.
César, sang des Troyens, plus renommé qu’Hercule,
Ce Jules descendu de ton aimable Jule,
Ce grand César naîtra, dont le nom glorieux
Doit remplir l’Univers, et voler jusqu’aux cieux ;
Vainqueur de l’Orient, et partout indomptable,