Page:Segrais - L’Énéide (Tome 1), 1719.djvu/109

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Les uns tracent les murs, haussent la forteresse,
Les autres, sur les lois affermissant l’Etat,
Des plus sages Vieillards composent un Sénat ;
D’autres creusent le port ; chacun choisit sa place,
Et par le soc tranchant s’en fait marquer l’espace ;
En tous lieux retentit pour l’ouvrage nouveau,
Ou la mordante scie, ou le pesant marteau.
Là se fonde un théâtre, ici roule avec peine
La superbe colonne, ornement de la scène.
    Des abeilles on pense admirer le travail
Quand des fleurs du Printemps pillant le riche émail,
Les unes font la cire, aux ruches la suspendent ;
Les autres au-dedans le doux nectar étendent ;
Celle-ci vole aux champs ; une autre à son retour
La décharge du faix, et s’en charge à son tour ;
Leur peuple est trop nombreux, on sonne la trompette ;
L’essaim aventurier cherche une autre retraite ;
Quelquefois tout décampe ; et leurs fiers bataillons
Présentent le combat aux paresseux frelons :
Jamais d’oisiveté dans leur petit empire.
    « Heureux quiconque ainsi ses ouvrages admire »
S’écrie Enée alors, contemplant ces palais ;
Il marche cependant dans le nuage épais,
Il avance, il approche, et lui-même s’étonne
Que mêlé dans la foule, il n’est vu de personne.
    Au centre de la ville était un bois plaisant :
Ces peuples Tyriens dans la terre creusant,
Soudain que sur ces bords les jeta la tempête,
D’un cheval belliqueux y trouvèrent la tête
Pour présage assuré d’un peuple courageux,
Comme l’avait promis un Oracle fameux.
A Junon dans ce bois Didon fondait un temple ;
Avec étonnement le Troyen le contemple :
Par vingt degrés de bronze aux portes il parvient ;