Page:Segur - Actes des Apotres.djvu/259

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mais André, qui ne se sentait pas de joie de se voir si près de souffrir le martyre pour son cher Maître, éleva la voix de toutes ses forces, et conjura cette foule de Chrétiens de ne point retarder son supplice.

Armand. Est-ce qu’ils ont obéi ?

Grand’mère. Il paraît que oui, car les livres qui racontent le martyre de saint André ne parlent plus de l’opposition du peuple.

Jacques. Je trouve qu’ils auraient dû le délivrer malgré lui.

Grand’mère. Ils ont préféré céder à ce vif désir de l’Apôtre ; les fervents Chrétiens l’ont mieux compris qu’on ne l’eût fait de nos jours.

Les soldats qui menaient saint André au supplice continuèrent donc leur marche. Dès que l’Apôtre aperçut la croix qui lui avait été préparée, il se sentit transporté de joie et s’écria :

« Je te salue, ô croix vénérable ! Avant que mon Seigneur eût été étendu sur toi, tu étais un signe d’horreur. Maintenant tu n’as plus que des charmes. C’est avec bonheur et confiance que je viens vers toi. Ô croix que j’ai toujours aimée ! Ô croix longtemps désirée ! Ô croix que j’ai cherchée avec ardeur, reçois-moi ! Rends-moi à mon Maître, afin que je passe de tes bras dans ceux de mon Seigneur, qui m’a racheté étant couché sur toi ! »

Madeleine. Grand’mère, ce sont des sentiments tellement beaux qu’ils sont presque incompréhensibles. Qu’on accepte avec résignation un affreux supplice, cela se comprend ; mais qu’on le recherche, qu’on le désire, j’avoue que je ne le comprends plus. Si je devais être crucifiée, je