fées conſtantes d’un homme ſur quelques lignes qu’il a tracées une fois, que ſur la poſition & l’aspect des fibres de ſon cerveau.
En un mot, c’eſt une maxime capitale, qu’un écrit, quel qu’il ſoit, ne peut être imputé comme faute ou comme délit, qu’au moment où l’auteur même l’a communiqué ſans contrainte. Jusques-là il n’eſt rien ; & ſelon l’expreſſion de M. de Voltaire, ce n’eſt que du noir appliqué ſur du blanc.
Si l’on veut bien-meſurer la grandeur de l’abus que je ſappe par cette règle, il n’eſt point d’homme qui ne doive me pardonner cent erreurs en faveur de cette utile vérité.
Le ſujet que je traite m’a ſouvent conduit à réfléchir ſur les abus de l’imprimerie, & j’ai quelquefois oſé comparer par certains côtés cette invention à celle de la poudre à canon. Je me diſois : ſi la poudre à canon étoit un ſecret uniquement révélé aux hommes libres, pour défendre leur liberté ; ſi l’imprimerie étoit le ſecret de quelques hommes vrais & éclairés, pour mieux répandre la lumière & la vérité ; il faudroit tout-à-l’heure élever aux inventeurs de ces arts plus d’autels que la Grèce n’en dreſſa pour Cérès & Triptoleme, inventeurs du labourage : mais par quelle fatalité attachée à toutes les inventions humaines, à commencer par les loix, le mal uſurpe-t-il toujours ce qui fut inventé pour le bien ? Toujours la vertu ſème, & le vice moiſſonne. Vous propoſez aux hommes un art pour ſe défendre ; ils en font un art pour s’attaquer : vous inventez un art pour répandre au loin la vérité, & déjà la calomnie