Page:Servières - Richard Wagner jugé en France, 1887.djvu/285

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

voit obligée de ne pas le reconnaître, cette scène serait moins émouvante que celle où Siegfried combat un dragon enchanté.» … « La donnée des drames lyriques de Wagner est aussi puérile (que celle des féeries du Châtelet) ; les géants, les nains, les fées, les magiciens, en un mot, tous ces personnages en carton du monde surnaturel ne sauraient prendre, sur la scène française, la place des héros en chair et en os que nous présente l’opéra historique. »

M. Gounod, dans une lecture sur Don Juan, à l’Institut, à la séance annuelle des cinq académies, sous couleur de faire l’éloge de Mozart qui n’est plus à faire, trouva l’occasion propice pour morigéner les jeunes compositeurs accusés de tendances déplorables : « Ah ! jeunes gens qui repoussez et redoutez la doctrine des maîtres comme un joug humiliant pour votre individualité ombrageuse et qui vous jetez à la tête du premier charlatan venu ! » et les conjura de rentrer dans le giron du Conservatoire. Cette aigre allusion à Wagner fut commentée dans la presse. En réalité, cette mauvaise humeur de M. Gounod doit être attribuée au peu de retentissement qu’avait eu en France son oratorio Rédemption, à un moment où tous les artistes avaient les yeux fixés sur Bayreuth. C’est qu’en effet, comme originalité, science musicale, inspiration, il y a loin de cette œuvre de la vieillesse de Wagner, Parsifal, à l’Agésilas de M. Gounod, qui fut, hélas ! le Tribut de Zamora et à l’Attila de M. Thomas, Fran-