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CYRANETTE

en nombreuse et agréable société. Alors, dans l’intervalle des chants et des jeux, entre les soupirs attendris des vieux, il se peut que l’on aime prêter l’oreille aux hurlements de l’ouragan et à la tambourinade sonore des cataractes célestes se déversant généreusement sur le toit. Il se peut… Il se peut… Et je ne conteste pas qu’à l’occasion j’y serais sensible, à ce drôle de charme-là. Mais les grandes eaux du matin au soir et du soir au matin : un ciel funèbre et pleurard qui ne se lasse pas de doucher vos ardoises et vos vitres, de faire gargouiller vos gouttières et sangloter vos citernes ; les giboulées succédant aux bourrasques et les bourrasques aux giboulées ; et n’avoir devant soi, pour tout reposoir, en premier plan, que les pelouses et les corbeilles d’un jardin à l’anglaise (qui tourne à l’aquarium) et, dans le recul, qu’une immense allée où s’égouttent les têtes échevelées de vieux chênes qui, telles les sœurs Plumet, se déplument un peu plus chaque jour, avoue, ma pauvre chérie, que cet ensemble n’a rien de folâtre lorsqu’on quinte comme un asthmatique et qu’affaissée sur une immense bergère, devant les immenses baies d’une des plus immenses chambres d’un vieil et grand manoir, on évoque malgré soi les harmonieux horizons du pays natal, ses ciels si purs, ses monts si pittoresques, ses lacs qui ne débordent pas ; et que, d’autre part, on songe qu’il va falloir renoncer aux petites distractions que l’on s’était promises et à ces festivities de Christmas où l’on devait chanter un si gentil « Noël » !

« Que n’es-tu près de moi ! C’est égoïste, le cri qui m’échappe là ! Mais toi, Nise, tu te plais partout. Un rien t’occupe et te distrait. Et tu me serais d’un autre recours que Gerty et même que Gladys pour me changer les idées. Au reste Gerty et Gladys sont sur le point de partir. Le capitaine Townsbridge et le lieutenant Simpson ayant été rappelés à leurs postes respectifs, il leur tarde de