Page:Sewrin, Brazier Jean qui pleure et Jean qui rit - 1815.djvu/9

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GUILLERET.

La vie hélas ! n’a qu’un très court espace,
Égayons-en jusqu’aux moindres instans ; (bis)
Avec le tems puisqu’il faut que l’on passe,
Tâchons du moins de bien passer le tems. (bis)
J’aurais pourtant besoin de cette rentrée-là.

BEAU-SOLEIL.

Oui, pour sortir de l’embarras où vous êtes.

GUILLERET.

Oh ! l’embarras… Au fond, ça ne m’inquiète pas beaucoup.

BEAU-SOLEIL.

Ma foi, ni moi non plus.

GUILLERET.

Ça ne m’empêche pas de dormir comme à mon ordinaire.

BEAU-SOLEIL.

Et moi donc, je ne fais qu’un somme.

GUILLERET.

En fait de soucis, vois-tu… (Il chante.) Lon, lan, la, laissez-les passer. Ah ! ah ! Jean Guilleret est connu dans le pays… Je ne ressemble pas à mon cher voisin, M. Jean Lepiteux.

BEAU-SOLEIL.

Ah ! c’est vrai ; il a toujours la larme à l’œil.

GUILLERET, riant.

Et malgré cela, il s’imagine qu’il est gai.

BEAU-SOLEIL, riant.

Oui, il croit qu’il est farce.

GUILLERET.

Et sa digne moitié, madame Lepiteux ? hein ?…

BEAU-SOLEIL.

Oh ! je ne la vois rire qu’une fois dans l’année : c’est le jour où l’on célèbre l’anniversaire de son mariage.

GUILLERET.

Apparemment que ça lui rappelle des souvenirs.

BEAU-SOLEIL.

Des souvenirs joyeux.

GUILLERET.

Et les femmes aiment beaucoup les souvenirs joyeux. Ta mère les aime aussi.

BEAU-SOLEIL.

En vérité ? Cette pauvre mère !

GUILLERET.

Elle n’oublie jamais que c’est le jour de Sainte-Aglaure, sa fête, que nous nous sommes mariés.