Page:Shakespeare - Œuvres complètes, Laroche, 1842, vol 1.djvu/160

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J’aurai encore six pence en poche, que toi tu n’auras pas un denier, vil Turc de Phrygie !

NYM. J’ai en tête des projets de vengeance.

PISTOLET. Tu veux te venger ?

NYM. Oui, par le firmament et ses étoiles !

PISTOLET. Avec le fer ou la ruse ?

NYM. Avec l’un et l’autre. Je vais révéler à Page le secret de cet amour.

PISTOLET.

Et moi, je m’en vais à l’instant
Conter à Ford le piège qu’on lui tend ;
Lui dire que Falstaff, dans son impure flamme,
Veut lui gripper son or et lui souffler sa femme.

NYM. Je ne laisserai point refroidir ma colère : j’exciterai Page à recourir au poison ; je le rendrai jaune de jalousie ; car ces changements de physionomie sont un augure redoutable ; et voilà.

PISTOLET. Tu es le Mars des mécontents : je te seconderai ; allons, marche.

Ils sortent.

Scène IV.

Une chambre chez le docteur Caïus.
Entrent Mme VABONTRAIN, SIMPLE et BARBET.

Mme VABONTRAIN. Jean Barbet, va, je te prie, à la fenêtre, et regarde si tu vois venir mon maître, le docteur Caïus : s’il arrivait maintenant et trouvait quelqu’un à la maison, il ferait un train à faire perdre patience au bon Dieu et aux sujets du roi.

BARBET. Je vais faire le guet.

Mme VABONTRAIN. Va, et je te promets que nous aurons un posset[1] ce soir, à la dernière lueur d’un feu de houille. Un honnête garçon, plein de bonne volonté, la meilleure pâte de domestique qui se puisse voir ; point rapporteur, pas le moindre fiel ; son plus grand défaut est d’être trop adonné à la prière ; sous ce rapport il est quelquefois répréhensible : mais chacun a son défaut ; laissons cela. (À Simple.) Votre nom, dites-vous, est Pierre Simple ?

  1. Breuvage à l’anglaise, composé de vin, de muscade, de crème, d’œufs bien battus et de sucre ; on peut remplacer le vin par de la bière.