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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1862, tome 3.djvu/428

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voisins ne veuillent pas les réconcilier. Oui, je pourrais ruser comme un autre, dans l’occasion.

TITANIA. — Tu es aussi sensé que tu es beau.

BOTTOM. — Oh ! ni l’un ni l’autre. Mais si j’avais seulement assez d’esprit pour sortir de ce bois, j’en aurais assez pour l’usage que j’en veux faire.

TITANIA. — Ah ! ne désire pas de sortir de ce bois. Tu resteras ici, que tu le veuilles ou non. Je suis un esprit d’un rang élevé ; l’été règne toujours sur mon empire ; et moi, je t’adore. Viens donc avec moi, je te donnerai des fées pour te servir ; elles iront te chercher mille joyaux dans l’abîme ; elles chanteront tandis que tu dormiras sur un lit de fleurs ; et je saurai si bien épurer les éléments grossiers de ton corps mortel, que tu voleras comme un esprit aérien. Fleur-des-Pois, Toile-d’Araignée, Papillon, Graine-de-Moutarde !

(Quatre fées se présentent.)

PREMIÈRE FÉE. — Me voilà à vos ordres.

SECONDE FÉE. — Et moi aussi.

TROISIÈME FÉE. — Et moi aussi.

QUATRIÈME FÉE. — Où faut-il aller ?

TITANIA. — Soyez prévenantes et polies pour ce seigneur : dansez dans ses promenades, gambadez à ses yeux ; nourrissez-le d’abricots et de framboises, de raisins vermeils, de figues vertes et de mûres ; dérobez aux bourdons leurs charges de miel, et ravissez la cire de leurs cuisses pour en faire des flambeaux de nuit que vous allumerez aux yeux brillants du ver luisant[1], pour éclairer le coucher et le lever de mon bien-aimé ; arrachez les ailes bigarrées des papillons, pour écarter les rayons de la lune de ses yeux endormis. Inclinez-vous devant lui, et faites-lui la révérence.

PREMIÈRE FÉE. — Salut, mortel !

SECONDE FÉE. — Salut !

TROISIÈME FÉE. — Salut !

QUATRIÈME FÉE. — Salut !

  1. « C’est la queue du ver luisant (lampyris), qui est phosphorique, et non ses yeux. » JOHNSON.