Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1862, tome 6.djvu/294

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les deux parties de Henri IV. Le choix entre différentes versions est d’ailleurs le droit le moins contesté et le moins contestable des auteurs dramatiques.

La tragédie de Richard II est donc, généralement parlant, assez conforme a l’histoire ; et la manière dont le poète a représenté la déposition de Richard et l’avènement* au trône de Henri de Lancastre paraît singulièrement d’accord avec ce que dit liume au sujet de cet avènement : a ll (Henri IV) devint roi, sans que personne pût dire comment ni pourquoi. » Mais il faut être, comme l’était liume, touta fait étranger au spectacle des révolutions, pour être embarrassé à dire comment et pourquoi le duc de Laucastre, après avoir agi quelque temps au nom du roi qu’il tenait prisonnier, se mit sans aucune peine a sa place. Shakspeare n’a pas cru nécessaire de l’expliquer : Richard est parti de Flintcastle avec le nom de roi a la suite de Bolingbroke ; nous le revoyons signant sa propre déposition. Le poëte ne nous indique en aucune manière ce qui s’est passé ; mais pour ne pas deviner comment s’est accomplie la chute de liichard, il faudrait que nous eussions bien mal compris ce qui nous a été présenté du spectacle de ses premières disgrâces : la conversation du jardinier avec ses garçons en complète le tableau en nous révélant leur effet sur Fopinion. (Test un trait de l’art de Shakspeare pour nous faire assister à toutes les parties de li évènement ; il nous transporte toujours la où il frappe ses coups les plus décisifs, tandis que loin de nos yeux l’action poursuit son cours, et se contente de nous retrouver toujours au but.

Bien que cette tragédie ait été intitulée Ia. Vie et la Mort de Richard II, elle ne comprend que les deux dernières années de ce prince, et ne contient qu’un seul événement, celui de sa chute, catastrophe a laquelle tout marche dès le début de la pièce. Cet événement a été considéré sousldifferentes faces, et une anecdote assez singulière nous a révélé Peitistence d’une autre tragédie sur le même sujet, antérieure, a ce qu’il paraît, à celle de Shakspeare, et traitée dans un esprit tout différent. Quelques-uns des partisans du comte d’Essex, le jour qui précéda son extravagante tentative, voulurent faire jouer une tragédie ou, comme dans celle de Shakspcare, on voyait Richard II déposé et tué sur le théâtre. Les acteurs leur ayant représenté que la pièce était tout à fait hors de mode et ne leur attirerait-pas assez de monde pour couvrir leurs frais, sir Gilly Me :-rick, l’un d’entre eux, leur donna quarante shillings en sus de la recette. Ce fait est rapporte au procès de sir Gilly, el servit à sa condamnation.