Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 2.djvu/46

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de ces stalles, il y avait un cheval debout, sellé, harnaché et caparaçonné. Devant chaque cheval se tenait un homme, couvert d’une cotte de mailles, portant un casque et une lance, et armé de pied en cap comme un chevalier du moyen âge. Mais ce qui étonna le plus le visiteur, c’était le silence profond au milieu duquel il marchait. Dans cette salle gigantesque qui paraissait contenir toute une armée, pas un cri, pas un hennissement, pas un murmure. Les chevaux, immobiles, ne soufflaient pas. Les écuyers, immuables, ne respiraient pas.

En voyant cela, le jockey, qui, paraît-il, était un esprit fort, craignit d’être dupe d’une mystification.

— Seigneur, dit-il, vous m’invitez à visiter une écurie, et vous me menez dans une salle où, au lieu de chevaux, je vois je ne sais quelles bêtes empaillées, et, au lieu de palefreniers, des mannequins couverts de vieille ferraille ! Ce n’est pas une écurie, cela, c’est un musée.

— Vous vous trompez, l’ami, répliqua froidement le vieillard. Ce sont bien des cavaliers véritables et de véritables chevaux que vous voyez. Seulement, ils ne doivent se mettre en mouvement que le jour de la grande bataille.

— Quelle bataille ?

— Une bataille qui doit avoir lieu bientôt.

— Et où cela ?

— Du côté de Culloden.

Le jockey sourit d’un air d’incrédulité.

En parlant ainsi, les deux promeneurs étaient arrivés à l’autre bout de l’écurie, devant une petite porte au-dessus de laquelle étaient pendus une épée et un cor.

— Vous voyez bien cette épée, dit le vieillard à son compagnon, je la prendrai le matin de la bataille ; et alors, je soufflerai dans le cor que voici pour réveiller